Ils font, façonnent ou bousculent notre paysage économique et entrepreneurial…
Ils s’impliquent dans la vie de la cité pour promouvoir et porter leurs idées…
Pour ADEKWA et AUDIENCE, ils livrent leurs pensées et leurs projets présidentiels…
Épisode #32 : Emmanuel DRUON
Emmanuel Druon est président de Pocheco et fait de l’écolonomie (le juste milieu entre économie et écologie) son leitmotiv. Il dépeint sa démarche dans l’ouvrage Écolonomie, entreprendre sans détruire (Actes Sud, 2016).
Moi Président, je ferais du slogan « entreprendre sans détruire » une réalité. Puisque le groupement intergouvernemental des études sur le climat (GIEC) écrit, rapport après rapport depuis 1988, que les ressources fossiles, fissibles et minières sont épuisées, chez Pocheco la feuille de route est claire ! Les seules ressources naturelles exploitables doivent être renouvelables à l’échelle du temps humain.
Il faut s’assurer qu’elles sont effectivement préservées et renouvelées dans le respect de la biodiversité des espèces. Tous les déchets doivent devenir des ressources. La circularité, le zéro déchet deviennent les nouvelles normes. Ici et maintenant.
Nous produisons deux milliards deux cent millions d’enveloppes de gestion par an. Nous avons choisi des colles sans composés organiques volatiles (COV), sans squelettes de poissons ou d’animaux parce que nous sommes informés que les ressources halieutiques aussi sont épuisées et que la consommation (par l’occident) de viande de mammifères terrestres engage la déforestation pour les plantations de soja et engage aussi des traitements violents dans les abattoirs. À l’usine nous ne portons plus de masques, ni de gants, depuis que nous avons changé toutes nos encres toxiques par des encres à base d’eau, de pigments naturels et sans métaux lourds. Parce que dans le Nord nous savons le prix à payer pour la santé de la dissémination sur les terres et dans les nappes phréatiques des résidus industriels polluants.
Nous réutilisons l’eau de pluie pour nettoyer nos outils avec du savon de Marseille. Nous nettoyons les eaux souillées dans les bambous. Leur système racinaire active des bactéries qui décomposent les souillures. Ils s’en nourrissent. La seule biomasse engendrée c’est la tige du bambou elle-même qui après quatre ans est coupée pour faire des pellets avec lesquels on se chauffe. Donc on a aussi coupé toutes les énergies fossiles sur le site.
Et nous sommes auto suffisants en ressources hydriques. Sur le plan du rapport des uns et des autres au travail. En partant de l’idée que nous sommes heureux de travailler ensemble et que nous sommes confiants les uns dans les capacités des autres. Nous avons supprimé les strates hiérarchiques pour s’appuyer sur la coopération plutôt que sur la compétition. Le temps de formation et la transmission de la connaissance font office de norme pour produire sans gâcher et servir nos clients aux prix du marché et avec une qualité fiable.
Comme nous l’a déclaré l’astrophysicien Hubert Reeves le 16 avril 2015 à l’occasion de l’inauguration de l’oasis nature de l’association humanité et biodiversité sur le site de Pocheco : « l’Humanité est récente à l’échelle du temps, et elle est vulnérable ». Pouvons-nous tracer un parallèle entre la situation que nous confrontons depuis vingt ans dans notre PMI du nord de la France et la situation que confronte l’humanité décrite par les scientifiques réunis au GIEC ? S’agissant d’effondrement et de reconstruction je pense que oui. Nous pouvons poser un parallèle.
Souvent la question m’est posée de la reproductibilité de notre “modèle”. Nous, pauvres, immigrés, ouvriers, peu formés, sur un marché en effondrement depuis plus de quarante années. Pourtant nous témoignons, qu’entreprendre sans détruire est possible. L’enveloppe se vend ardument plus qu’un centime l’unité. Je réponds à l’inquiétude (légitime) qui s’exprime souvent de la reproductibilité du “modèle” par une proposition : la seule raison pour laquelle notre “modèle” ne serait pas reproductible par chacune et chacun d’entre nous le souhaitant, ce serait simplement que nous n’aurions pas essayé de le reproduire.
Moi Président, je forme des vœux de réussite ! Le sujet de la survie des espèces vivantes nous mérite dans toute notre humanité. Il demande toute notre détermination et toute notre imagination.
Emmanuel DRUON
ADEKWA Avocats
Cabinet d’avocats
Lille – Roubaix – Douai – Valenciennes – Cambrai – Bordeaux