Coup de gueule x Amine BENYAMINA

[ Coups de Gueule   –   Épisode 18/20 ]

 

 

 

LE PRÉSIDENT FACE AUX ADDICTIONS :
LA JEUNESSE ET L’ARCHAÏSME

 

ADEKWA Avocats Lille - Amine BENYAMINA

 

Amine Benyamina est psychiatre et professeur de psychiatrie, spécialisé en addictologie. Il dirige aujourd’hui un des pôles les plus importants de prise en charge des conduites addictives, situé à l’hôpital Paul-Brousse de Villejuif.

 

 

L‘irruption d’un jeune président dans le paysage politique a suscité l’espoir du mouvement et du changement dans les domaines les plus variés. Mais il en est un où, dès ses propos de campagne, la frilosité transparaissait dès l’origine, et contrastait singulièrement avec le vent nouveau qu’il affirmait représenter, c’est celui des addictions. Et c’est d’autant plus intéressant que ces problèmes de société majeurs sont à la croisée des chemins entre santé, styles de vie, sécurité publique et économie, un champ en or pour un président qui veut dépoussiérer et remettre en mouvement une société immobile et effrayée de la marche du monde. Pourtant, d’emblée, Emmanuel Macron a douché les espérances de renouveau sur deux sujets, le cannabis et la consommation d’alcool.

 

Depuis des décennies tous les experts s’accordent à reconnaitre l’échec de la politique française, qui s’est avérée totalement impuissante à enrayer l’essor du cannabis qui est devenu aujourd’hui une consommation de masse. Sur la base de ce constat, différentes politiques ont été mise en œuvre pour sortir de l’impuissance qui profite surtout à l’économie mafieuse, sape la vie des quartiers, décourage les policiers et les juges et nuit à une politique de prévention efficace. Les modalités sont différentes selon les pays et les cultures, mais la tendance (qui semble émerger est celle d’une légalisation plus ou moins encadrée. Notamment au Portugal, en Uruguay ou aux USA) est la même vers une légalisation plus ou moins encadrée qu’il s’agisse du Portugal, de l’Uruguay ou de nombreux Etats des USA. Le jeune premier ministre canadien, Justin Trudeau, a décidé la légalisation du cannabis, évidemment très encadrée, sur l’ensemble du pays. Pendant ce temps, le président Macron retouche COUP DE GUEULE a minima une loi inappliquée (car inapplicable), vouée, selon toute probabilité, à la même absence de résultat. Il aurait également pu surfer sur la vague entrepreneuriale pour développer l’industrie hautement prometteuse sur le plan économique du cannabis thérapeutique, comme Israël ou les USA. Mais non, il semble tétanisé par le sujet.

 

Dès sa campagne, il a également refroidi les experts de santé en déclarant son amour du vin, malgré le très haut niveau de consommation d’alcool dans notre pays et les morts, maladies, handicap et violences qui en résultent. Loin de tout exercice moderne de leadership, Emmanuel Macron décidait que le goût du prince faisait loi. Il déclarait son amour au terroir, en dégustant ostensiblement les produits les plus raffinés, loin du vin en cubitainer que consomment les Français les plus modestes, tout en désavouant sa ministre de la santé au nom de son bon plaisir.

 

La politique envers les addictions qui semble se dessiner sous la conduite du président Macron est bien loin du dynamisme et de l’innovation qu’il déclare incarner. Références aux valeurs confortables de la bourgeoisie, déconnexion de la difficulté des quartiers qui subissent depuis trop longtemps les effets d’une politique avant tout répressive, et principes des plaisirs des nantis s’annoncent-ils comme les piliers de l’action à venir  ? Mais nous le savons depuis longtemps, la jeunesse peut parfois très bien coexister avec l’archaïsme, et la nouveauté de façade avec le conservatisme.

 

Cela ne peut pas être le cas.

 

 

 

 

 

Tribune issue du dernier numéro de notre magazine AUDIENCE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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