Droit des élus d’opposition : la question du local commun (par Etienne Colson, ADEKWA Avocats Lille)

 

 

Au sein des communes, quel élu d’opposition ne s’est jamais plaint d’être privé de local ? Cette question est l’occasion de faire ici le point sur un sujet que la loi et le juge ont clairement balisé…

 

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|  par Etienne COLSON, Avocat au Barreau de Lille  |

 

Dans les communes de plus de 3 500 habitants, les conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale qui en font la demande ont droit à la mise à disposition d’un local commun (art.L.2121-17 du Code général des collectivités territoriales, ci-après CGCT).

La demande doit être adressée au maire. Elle n’est soumise à aucune règle de forme particulière. Il sera souhaitable, en pratique, de toujours la présenter par écrit, en demandant au maire d’en accuser réception. Dans le cas de rapports difficiles entre le maire et les conseillers minoritaires, il conviendra d’adresser cette demande par pli recommandé, avec accusé de réception.

Le maire est tenu de satisfaire à cette demande « dans un délai raisonnable », deux mois semblant un maximum (CE, 28 janvier 2004, Cne de Pertuis). Il ne s’agit donc pas d’une simple faculté laissée à l’appréciation du maire (TA Lille 16 févr. 1994, Joly c/ Commune de Wattrelos).

Ce local peut être extérieur aux bâtiments de l’hôtel de ville. L’esprit de la loi implique néanmoins que ce local soit aussi rapproché que possible des locaux de la  mairie, et notamment de celui où se tiennent les réunions du conseil municipal. Ainsi a-t-il été jugé que ce local commun peut se trouver situé dans un foyer d’hébergement pour personnes âgées (TA Rennes 12 févr. 2004, Le Menn).

Ce local doit être aménagé de telle sorte qu’il permette une utilisation conforme à son affectation, c’est-à-dire la tenue de réunions par les conseillers, l’étude de documentations et l’examen de dossiers.

Ces conditions d’aménagement doivent être satisfaisantes, compte tenu des possibilités matérielles et financières de chaque commune.

Mais, attention : un tel local n’est pas destiné à être une permanence ni à accueillir des réunions publiques. Pas davantage, il ne peut servir de permanence électorale pour les élus.

Un seul  local commun doit être mis à la disposition des conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale. Il en est ainsi quels que soient le nombre des conseillers demandeurs, les dates des demandes si elles sont distinctes, et les options politiques des demandeurs. Si l’état des locaux disponibles le permet, il n’est évidemment pas interdit au maire d’attribuer plusieurs locaux.

Les modalités d’aménagement et d’utilisation du local commun  sont fixées par accord (via une convention) entre les élus d’opposition et le maire. En cas de désaccord, il appartient au maire seul d’arrêter les conditions de cette mise à disposition (art. D.2121-12 du CGCT).

Dans les communes de moins de 10 000 habitants et de plus de 3 500 habitants, la mise à disposition d’un local administratif commun aux conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale peut être, dans la mesure compatible avec l’exécution des services publics, soit permanente, soit temporaire. Dans ce dernier cas, en l’absence d’accord entre le maire et les conseillers intéressés, la durée de mise à disposition ne peut être inférieure à quatre heures par semaine, dont deux heures au moins pendant les heures ouvrables. Dans les communes de 10 000 habitants et plus, les conseillers municipaux concernés peuvent, à leur demande, disposer d’un local administratif permanent.

Dans tous les cas, la répartition du temps d’occupation du local administratif mis à la disposition des conseillers minoritaires entre leurs différents groupes est fixée d’un commun accord. En l’absence d’accord, le maire procède à cette répartition en fonction de l’importance des groupes.

En cas de refus de mise à disposition d’un local ou de mise à disposition manifestement insatisfaisante en termes de durée ou de moyens alloués, les conseillers minoritaires disposent d’une arme efficace : le référé-suspension devant le Tribunal administratif (art.L.521-1 du code de justice administrative). Le juge ordonnera la suspension de la décision de mise à disposition du local à une double condition : les requérants devront démontrer l’urgence qui s’attache à une telle suspension et l’illégalité de la décision en cause. Le juge peut alors statuer dans un délai compris entre quinze jours et un mois en enjoignant au maire, sous astreinte, de fournir aux intéressés un local propre à exercer leurs droits d’opposants.  

 

 

 

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